Sunday, October 02, 2011

Algérie : 5 Octobre 1988, La révolution téléguidée ?

Cela a commencé les derniers jours de septembre. Chadli Bendjedid appelle carrément le peuple algérien à la révolte. Inflation, spéculation, pénurie, FMI, Club de Paris, vingt six milliards de dollars de dettes extérieures...
Au bout de treize ans de gourvernance au pif le pays était à genoux, en faillite, en cessation de paiement. Les milliardaires du régime avaient vidé les coffres du Trésor public et de la banque centrale pour un placement sécurisé en France, en Suisse, aux Etats Unis, à Bahreïn, en Arabie Saoudite et même au Maroc. Des barons du sérail avaient déja préparé leurs valises pour un aller sans retour sous des cieux plus cléments. Tous les dictateurs déchus arabes, latino-américains, africains et asiatiques se sont installés en France, en Espagne, en Amérique (en général chez l'ancienne puissance coloniale). Eux, leurs ministres, leur généraux, leurs enfants. Nous dirons pourquoi dans une prochaine chronique.
Le discours du 28 septembre 1988 du président de la république en faillite morale et matérielle était selon de nombreux observateurs une tactique de transfert de la guerre des clans du sommet de l'Etat vers la rue. Tactique éprouvée sous d'autres dictatures plus anciennes en Asie et en Amérique Latine.
La bagarre était féroce entre le clan Chadli et le clan Messaadia qui dominaient le sérail.
Terrible conjonction :
Le peuple était en ébullition à cause du chômage, de la faiblesse du pouvoir d'achat du dinar, de la pénurie de logements de l'OPGI qui se vendaient (se vendent à ce jour) au marché noir en toute illégalité pendant que des familles végètent depuis 7O ans voire un siècle dans des conditions inhumaines.
Disons que le discours de Chadli a été l'étincelle qui a allumé la mèche du 5 Octobre 1988.
Les généraux étaient là pour jouer aux pompier en lançant les troupes contre des manifestants qui avaient de la haine pour tous les clans du pouvoir.
Ni le président de la république ni le secrétaire général du FLN n'avaient prévu cette vague de détestation et de désespérance qui les aurait tous balayés sans la sauvagerie de la répression militaire contre les enfants d'Octobre. Nous eûmes l'indicible douleur de voir nos enfants affronter les chars, mains et poitrines nues, comme s'ils étaient sortis dans la rue pour un suicide collectif parce qu'ils ne supportaient plus l'injustice, la hogra, le piston, la mal vie. Ils cassaient tout, brûlaient tous les symboles du pouvoir de la magouille et de la médiocrité. Les services de sécurité et l'armée étaient donc en "droit" de défendre les institution de la république en tirant sur les manifestants, en torturant et sodomisant des enfants qui exprimaient avec tant de force leur haine envers le régime.
Pour justifier la sauvagerie de la répression le président Chadli accusera les manifestants d'avoir violer le domicile de sa ministre Z'hor Ounissi qui a été montré par l'Unique/inique qui n'a pas montré les gamins qu'on torturait et qu'on sodomisait pour leur haine du régime. Ces gamins sont aujourd'hui des hommes qui souffrent encore psychologiquement des traumatismes subi en 1988.
L'armée du peuple avait torturé le peuple à travers ses enfants.
Les soldats étaient à peine sorti de l'adolescence. Les manifestants aussi.
Les généraux furent très fier de sauver l'Etat contre ce qu'un intellectuel* de service qualifiera de "chahut de gamins".
Depuis l'Algérie n'a plus connu ni paix ni stabilité.
A tous les échelons les têtes furent permutées mais les méthodes de gouvernance n'ont guère changé. L'Algérie reste écrasée par un pouvoir à deux visage : l'un masqué, l'autre découvert. Le clanisme, le régionalisme, le tribalisme, l'affairisme, le clientélisme ont été et demeurent encore les fléaux qui empêchent le pays de sortir des ténébres.
Comme depuis 1962.
Le 5 Octobre 1988 nous ne pouvons en parler sans éprouver de la honte.
C'était à nous d'affronter les chars, mains et poitrines nues, pour préserver nos enfants de la sauvagerie militaire.
Hocine Mahdi
Le 2 octobre 2011
*) Ali Ammar directeur du magazine Actualité de l'émigration et responsable de l'Amicale des Algérien en Europe.

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