Sunday, March 16, 2008

La route qui tue 3 morts, 20 blessés à Constantine


La route qui tue
3 morts, 20 blessés pour une rotation de plus
Hier, en début d’après-midi, entre le Khroub et Aïn S’mara le chauffeur d’un autobus n’avait qu’un souci : gagner quelques minutes sur des concurrents pour arriver au terminus. Aussi, il avait perdu de vue qu’en négociant un virage dangereux pour dépasser une voiture, il jouait avec la vie des passagers et sa propre vie. Gagner une rotation qui aurait rapporté à peine mille dinars à son patron en sacrifiant les passagers, serait-il devenu un jeu ? 3 morts et 20 blessés dont 4 gravement en plus du bus en piteux état. Nous posons cette question parce que la vitesse et le souci de rentabilité sont devenus le sport de quelques chauffeurs du transport urbain et suburbain. Surtout entre 11 h et 16 h, instant de basse fréquentation sur certaines lignes en aller et en retour (Khroub, Aïn S’mara, Didouche-Mourad, Hamma Bouziane). Malgré la vétusté des routes de la wilaya de Constantine mal faites et non conformes à la réglementation, les conducteurs ne craignent pas de prendre des risques (dépassement dangereux, pneus lisses, freins incertains). Nous étions des usagers de ces cercueils roulants. Heureusement que la régie municipale a repris ses activités. Ce qui donne le choix aux passagers pour se détourner des chauffeurs qui se font la concurrence pour une rotation de plus.
M. H.

Constantine / Journée nationale des handicapés «Mon frère me bat, mon père se délecte de ma douleur»



Constantine / Journée nationale des handicapés
«Mon frère me bat, mon père se délecte de ma douleur»
En m’installant dans un coin de la salle d’attente d’un service social de l’APC de Constantine, je me suis retrouvé témoin d’une discussion bouleversante. Témoin involontaire. Le hasard en a décidé ainsi. C’était jour de fête… Ce devait être un jour de fête en l’honneur de tous les handicapés d’Algérie. J’attendais un responsable pour en parler avec lui et recueillir quelques informations. Mais les propos que j’ai entendus sans le vouloir sont révélateurs de l’insuffisance des actions qui sont entreprises par les autorités locales et les associations en faveur de cette catégorie de citoyens.
La douleur n’est ni visible ni audible. Les souffrances morales sont insupportables d’autant plus qu’elles sont internes et pernicieuses à l’image d’un virus. La dignité de l’être humain exige de souffrir jusqu’à la limite, sans gémir, discrètement. Mais la peur également. Deux femmes handicapées étaient assises près de moi, l’une, une sexagénaire, l’autre, âgée entre 35 et 40 ans. La première écoutait. La plus jeune se confiait avec un grand dégoût pour la vie et pour les hommes. Elle avait le visage tuméfié, des bleus aux jambes et aux bras. Elle a parlé de bosses et de plaies à la tête. Témoin involontaire d’une souffrance indicible ma conscience ne me permet pas de garder le silence. Par contre, elle m’autorise à ne dire que l’essentiel, la discussion entre deux femmes qui semblaient avoir décidé de faire abstraction de ma présence mérite une halte.
- Il a 20 ans mon frère. Quand il me bat, mon père savoure le spectacle.
- Est-ce l’enfant de la deuxième épouse ?
- Non. Nous avons germé dans le même ventre.
- Pourquoi il vous bat ?
- Pour rien… Pourquoi mon père ne me protège pas ?
- C’est la question qui me tourmente. Je crois que je suis de trop à la maison. Je n’ai pas eu la chance de mourir… J’ai décidé d’aller vivre à Diar errahma, loin de Constantine… Mon père n’aura plus le plaisir de me voir me tortiller sous les coups de son fils. Les deux femmes sont des handicapées. Ma présence dans la salle était motivée par des obligations d’ordre professionnel. Cette bouleversante scène, brève mais très significative, nous oriente vers des questions auxquelles nous ne pensons pas parce qu’il ne nous viendra jamais à l’esprit l’idée qu’un jeune homme martyriserait sa sœur aînée handicapée avec le consentement de son père qui ressent du plaisir ou laisse faire. C’est trop monstrueux. Croire ou douter n’est pas le problème. Il y a tellement de choses inimaginables qui arrivent autour de nous. Ces confidences ont le mérite de mettre en exergue l’inexistence de cellules d’écoute et de soutien psychologique dans l’organigramme des services sociaux des APC et autres établissements qui sont chargés des problèmes des handicapés. Une femme qui est martyrisée au sein de sa famille ne se plaindra pas aux autorités, mais elle parlera facilement à des femmes qui sauront la rassurer, la soutenir et la protéger. Des cellules d’écoute sont aussi nécessaires que les centres de soins. Il y a tellement de souffrances cachées que nous ne soupçonnons pas !
Par Mehdi Hocine


14 mars à Constantine

Les handicapés en fête ?

En prélude à la célébration annuelle de la Journée des handicapés qui a eu lieu le 14 mars, la direction des affaires sociales n’a pas lésiné sur les moyens à l’effet de démontrer qu’elle est sensible aux problèmes des citoyens qui ont des besoins spécifiques. Conférence, spectacle musical, exposition, distribution de tricycles, de chaises roulantes, de diplômes et de nouvelles… promesses qui s’ajoutent à celles qui ont été faites l’année dernière à la même occasion et à la même tribune et qui sont restées des… promesses. A ce propos, la fête organisée hier au centre culturel Malek-Haddad a brillé par le boycott des non-voyants. «Ne pas servir d’alibi au gaspillage des deniers publics fait en leurs noms… Eux qui ne perçoivent que 1 000 DA par mois, malgré l’engagement du ministre, Djamel Ould Abbas, de revaloriser leur pension et celle des malades chroniques non salariés. Engagement pris en 2006 et 2007». Les non-voyants posent une question pertinente : «Quel sens donner à la célébration d’une Journée des handicapés si les conditions de vie se détériorent de jour en jour, malgré les dépenses assez conséquentes consenties par l’Etat ?» Les fêtes et les réceptions dévorent une bonne partie du budget qui devrait être entièrement consacré aux équipements et à une réelle assistance aux plus démunis. Le versement d’une pension mensuelle de mille dinars étant considéré comme une insulte à la dignité humaine. Nous retenons de cette manifestation les efforts des techniciens de l’Office de fabrication d’appareillage pour handicapés. Ils enregistrent une très forte demande en bras et jambes artificiels. Pour le reste, à parler franchement, c’est une «zerda» où ne se régaleront que les opportunistes. Comme toujours.
Mehdi Hocine


Sunday, March 09, 2008

Constantine La neige c’est beau, c’est dur


En décembre, les gens sont sorties légèrement vêtues, en juin ils circulaient emmitouflés dans de lourds manteaux. Constantine du 21e siècle a appris à vivre au rythme des sautes d’humeur des saisons qui jouent à saute-mouton. Ne boudons pas notre plaisir. Hier seulement, des agriculteurs se lamentaient. Aujourd’hui, ils se montrent plus optimistes. Les épis de blé ne seront pas à cent grains l’un. Mais ils donneront une récolte moyenne. C’est mieux que ce que tout le monde craignait avant cette tempête de neige si généreuse en eau. Ce matin, les enfants émerveillés sont sortis très tôt pour se rouler et gambader sur une neige vierge et cotonneuse. Ils sont déjà certains que les enseignantes seront absentes. La peur d’être bombardé par des jeunes misogynes ou masochistes qui mettent à l’intérieur des boules de neige des lames de rasoir, des bris de verre et des pierres, est suffisante pour justifier l’absence. C’est malheureux, mais nous avons vu à l’hôpital beaucoup de blessés dont une fille avec un œil crevé par une boule de… neige à la tempête précédente. Pour les travailleurs, la journée, a très mal commencé. Les bus sont paralysés tandis que les chauffeurs de taxi, agréés et clandestins, roulent des épaules. La nouvelle ville Ali Mendjli est isolée. Plus de cent minutes en voiture pour couvrir une très courte distance. Aussi, les épiciers qui vendent du pain affichent la mine des mauvais jours. Le pain est un produit d’appel. Quand il est disponible dans l’épicerie, les clients affluent et achètent beaucoup de choses avec le pain. Mais ce matin, les livreurs n’ont pas pu venir. Les routes menant vers Ali Mendjli n’ont pas été débloquées par les services de la voirie de l’APC. Ce qui fait que les boulangers de Zouaghi et du Khroub n’ont pas pu livrer le pain comme d’habitude. Comme de nombreux salariés n’ont pu se rendre à leur travail. Il a suffit que la neige couvre la ville et que l’APC tarde un peu à dégager les routes principales pour que des problèmes, risibles en d’autres temps, surgissent. Chaque fois ils reviennent avec la neige, perturbations du transport, pénuries de denrées de premières nécessité, pannes d’électricité, accidents stupides. Pourtant, nous ne sommes plus à l’âge des cavernes. Voici des décennies que l’homme moderne a appris à anticiper et prévenir, autant que faire se peut, les inconvénients dus aux intempéries et à l’enneigement qui sont annoncés à l’avance. Avant, chaque foyer disposait d’un petit stock de ravitaillement en prévision du mauvais temps et des impondérables. Aujourd’hui, quel est le salarié moyen ou petit qui peut épargner de quoi acheter un sac de semoule, un bidon d’huile et autres denrées essentielles pour affronter les rigueurs de l’hiver ? La faiblesse du pouvoir d’achat, l’inflation galopante et la spéculation mafieuse ne permettent qu’aux trabendistes et aux «élus» de se prémunir contre les mauvais jours. Quand les services de l’APC ne font pas leur travail au moment voulu, non, imposé par des circonstances données, la vie du citoyen se complique sérieusement. Les petits bobos deviennent très vite de graves problèmes. A quoi servent les «élus» s’ils ne sont pas capables d’épargner les complications aux citoyens dont les conditions de vie sont déjà assez compliquées.
La neige c’est beau, mais quand les autorités au niveau local ne mesurent pas l’importance de leurs responsabilités, la neige devient une dure épreuve pour les citoyens ordinaires.
Par Mehdi Hocine