Le Sud algérien, réputé paisible en raison de l'attachement nostalgique de ses habitants au sigle du Fln de feu, est entré en ébullition.
L'accumulation des problèmes devenus insolubles pour les jeunes algériens nés après 1970 incite inévitablement à la révolte citoyenne massive dans les villes et les villages enclavés. D'autant plus qu'en face d'une jeunesse en détresse se dressent des gouvernants arrogants, sourds et provocateurs. Ajoutez à cela la quiétude, des notables, des faux élus et des partis politiques qui n'ont été agréés que parce qu'ils ont été associés au partage inéquitable des miettes de la rente pétrolière.
Les règles du deal sont archi connues :
Pour être invités à la zerda du roi il est demandé aux "notables" locaux, aux partis politiques et aux associations dites civiles de discréditer les mouvements revendicatifs qui mobilisent sur des questions épineuses dont le chômage, l'arbitraire, le dysfonctionnement des institutions, la pauvreté, la violation des libertés individuelles et des droits de l'homme qui est flagrante mais que les citoyens n'ont pas le droit de défendre.
C'est une lapalissade de dire que le Sud algérien a toujours été l'unique source des revenus en dollars du pays. A ce jour 98 % du PIB viennent du Sahara.
Paradoxalement ce sont les habitants du Sud qui ont le moins bénéficié des revenus pétroliers. Chômage, inflation, sous équipement sanitaire, carences dans tous les domaines. Même quand les produits alimentaires de première nécessité et les médicaents étaient subventionnés par l'Etat providence ce sont les grossistes et les commerçants qui se sont scandaleusement enrichis en exportant clandestinement leurs quotas au Maroc et en Tunisie.
Des milliers de milliards de dinars détournés par une mafia rompue à tous les trafics des frontières, dont Hadj Betou en est le symbole, sans jamais être inquiétée.
Et comme les choses en Algérie sont toujours allées de mal en pire, nous voilà face à la réinvention de l'esclavage rémunéré par les deniers de l'Etat qui ne contrôle plus rien, ne régule plus rien...
Economie de bazar oblige.
N'y a t-il pas de quoi refaire une révolution pacifique du fait que le non droit et l'immoralité gangrènent tous les rouages de l'Etat à tous les paliers.
Louisa Hanoune connait très bien les dysfonctionnements des institutions nationales de haut en bas et de bas en haut. Elle continue de les dénoncer comme elle le faisait dans une période où protester contre la mauvaise gouvernance était considéré comme un acte de haute trahison.
Pourtant elle accuse les manifestants du Sud d'être manipulés par une diabolique "main" étrangère.
Cela ne lui ressemble pas du tout.
Nous avons connu Louisa plus intelligente, plus pertinente, plus lucide que cela.
Militante très active sur le terrain des luttes sociales et culturelles, ses tortionnaires l'accusaient d'être au service d'une puissance étrangère. Son corps et ses parties intimes servaient de cendrier et de pissotières à ses cruels bourreaux.
Que ressentait-elle en ces terribles moments de gégène quand ses tortionnaires la questionnaient sur la "main" étrangère qui la payait pour diviser le pays ?
Amnésie simulée !
Nous croyons très fort que Louisa Hanoune n'a rien oublié des humiliations et des atroces souffrances qui lui furent infligées à cause de son engagement en faveur de la dignité humaine avant 1980. Son corps en comporte les marques indélébiles.
Que s'est-il passé dans sa tête pour tomber aussi bas que ses anciens tortionnaires ?
A t-elle été retournée ?
S'est-elle embourgeoisées comme son copain Abdelmadjid S. Said ?
A t-elle vieilli ?
Elle dénonce la fraude électorale massive après s'être soumise au système des quotas en sachant que les députés et les sénateurs ne sont que des éléments de décor.
Elle doit être bonne la soupe monarchique qui pousse au mensonge et à la prostitution intellectuelle.
Quel virage en tête d'épingle pour une rebelle des années 1970 !
Pourquoi ce retournement semblable en tout à celui du mounafek* Bouguerra Soltani dit Aboudjera?
Aujourd'hui c'est elle qui se ridiculise en accusant des manisfestants pacifiques de servir un agenda étranger.
Un chômeur s'immole, se jette à la mer, cherche à fuir sous un ciel plus clément, se drogue, glisse dans la délinquance, ce n'est pas grave.
Pourquoi ne peut-il pas manisfester dans son pays sans être regardé en traitre de la nation ?
Est-ce plus grave que l'immolation, la harga, la drogue, la délinquance ?
Louisa Hanoune avait posé cette question en 1970.
A t-elle trouvé une réponse satisfaisante à cette interrogation qui nous obséde depuis des décennies ?
Le vrai traitre est celui qui renie les principes qui avaient motivé ses propres luttes pour un Etat de droit, pour la dignité des citoyens, pour le respect des libertés, pour l'indépendance de la justice.
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Hocine Mahdi
Le 31 mars 2013
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*) Mounafek : hypocrite
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