Thursday, May 03, 2012

Ce matin à Alger tout était gris

Arrivée hier tard à Alger. 
A la recherche d'une chambre d'hôtel, nous sommes passés deux fois rue Abane Ramdane devant le tribunal.
Calme plat.
Pas de chambre disponible.
Solution d'urgence :
Nous appelons une vieille relation kabyle.
Un coup de téléphone et nous voilà logés en plein centre-ville à un prix abordable. 
En voitures des supporters d'une équipe de foot en déplacement à Alger animent les rues, célébrant une victoire méritées de leurs idoles. En même temps ils profitent de cette ambiance festive pour casser du sucre sur le dos des politicards dont les affiches en grand format sont placardées sur les vitrines de quelques magasins spécialisés dans les produits d'importation et de luxe. Le foot étant devenu depuis les années Chadli un véhicule des idées subversives anti régime, comme les stade étant devenus autant de tribunes politiques pour une jeunesse au bord de l'exploision, les supporters sont autorisés de tout faire et de tout dire dans le cadre d'un match, dans les rues et dans les stades. 
Ouyahia, le plus visible dans les affiches électoralistes grand format, prend le plus gros du chapelet d'injures adressées aux candidats ventristes.
Nous paasons une petite heure dans un cyber café pour contacter des amis et avoir plus de détail sur le programme d'action de la matinée tracé par l'association "liberez Abdelkader Kherba".
Personne ne sait rien.
La nuit est lourde et pluvieuse, surtout elle est pleine d'un assourdissant vacarme. Les ouvriers continuent jour et nuit de creuser le tunnel du métro qui n'en finit plus d'être inauguré et d'être en chantier deux décennies après le premier coup de pioche symbolique.
Tôt le matin nous quittons l'hôtel pour une petite promenade en bord de mer.
Nous traversons la rue Abane Ramdane.
Grosse surprise :
Le tribunal est entouré de barrières métalliques.
Il n'est que 5 heures 56 minutes.
A quel moment de la nuit le tribunal a été placé sous haute sécurité ?
A 6 heures 30 minutes les premiers cars des troupes anti émeutes déchargent des dizaines d'hommes armés comme s'ils étaient en guerre contre un commando de terroristes.
Ils se déployent aussitôt en ceinture humaine autour du tribunal, à l'intérieur et à l'extérieur de la cloture métallique.
Les ruelles et les escaliers de la rue Didouche Mourad et du boulevard Zighout Youcef qui communiquent directement avec le tribunal sont surveillés par des policiers et les agents anti émeutes.
Nous sommes sidérés par une telle démonstration de force pour sécuriser le déroulement du procès du manifestant pacifique Abdelkader Kherba.
Ce procès a coincidé avec la journée internationale de la liberté d'expression et de la presse. Un groupe de journalistes a programmé une action revendicative sur la Place de la Liberté.
Mais aussi l'association "Liberez Abdelkader Kherba"  avait programmé un sit in devant le tribunal de la rue Abane Ramdane en cette journée du 3 Mai.
Un hasard ?
Certainement
Ce matin le ciel d'Alger était gris et la mer avait la couleur du ciel...
Un gris sale...
Démoralisant.
Démoralisant et gris comme nos politiciens qui se disputent férocement les privilèges qui découlent d'un mandat de député en plus du salaire mensuel de trente millions.
Mais la démonstration de force du gouvernement Ouyahia était la plus démoralisante car elle constitue la preuve que le régime est toujours contre la justice, contre la liberté d'expression, contre la souveraineté citoyenne.
Comme il l'a toujours été depuis le coup d'Etat de Ben Bella contre Benkhedda. Et quand nous nous disons que c'est grâce à l'attestation communale*, inventée par l'esprit corrupteur de Ben Bella, que des  harkis, des assimilationnistes et des opprtunistes ont acheté la qualité d'anciens moudjahid  nous perdons espoir de voir un changement qualitatif et pacifique d'un régime politique qui base toutes ses actions sur le partage de la rente pétrolière.      

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Hocine Mahdi

Le 3 mai 2012 : journée de solidarité avec Abdelkader Kherba 

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*) Je tiens cette information de l'historien Mohamed Harbi qui était directeur du cabinet présidentiel de Ben Bella et idéologue du FLN de 1963 à au 19 Juin 1965. Il était présent à une réunion quand Ben Bella avait institué l'attestation communale pour fidèliser une clientèle.        

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