Un capitaine fuyant son bateau et abandonnant ses troupes désemparées, c'est l'image que nous gardions du dictateur tunisien. Et bien, nous étions très loin de la réalité.
Selon l'avocat libanais de la famille Ben Ali la Tunisie a connu le deuxième coup d'Etat le plus propre et le plus intelligent d'Afrique, d'Asie et du Moyen Orient durant les soixante dernières années. Surtout que ce coup d'Etat historique a mis immédiatement fin au massacre des jeunes manifestants pacifiques sans l'intervention des forces françaises ou celles de l'OTAN qui auraient détourné la révolution du jasmin au profit du Destour.
Informé par des services de renseignement européens de la préparation d'un attentat à l'intérieur du Palais le responsable de la garde rapprochée du Président a supplié celui-ci de quitter Tunis pour quelques heures. Ben Ali a refusé de prendre l'avion qu'il avait commandé pour sa famille. Il craignait un attentat mais comptait trop sur ses "amis" français pour le protéger. Toujours est-il qu'à force d'insistance le responsable de sa sécurité a réussi de le convaincre de quitter, pour quelques jours seulement Tunis.
Ainsi l'avion de la famille Ben Ali tournera pendant des heures dans le ciel sans obtenir l'autorisation d'attérir nulle part.
Après avoir subi l'humiliation de sa vie de la part de son "ami" et protecteur Sarkozy le dictateur s'est finalement retrouvé exilé dans une luxueuse résidence en Arabie Saoudite. Il désirait passer une journée ou deux à Paris mais le monarque de l'Elysée l'avait snobé.
C'est une tradition: dès qu'un dictateur tombe ses protecteurs européens et Américains s'en lavent les mains et lui tournent le dos.Ils l'abandonnent sans état d'âme.
Souvenez-vous du Shah d'Iran, le plus puissant monarque de l'Orient, à la recherche d'un gîte comme un mendiant alors qu'il possédait des résidences 10 étoiles à Paris, Londres et Washington.
Les révélations de l'avocat de Ben Ali nous apprennent que des patriotes sincères au sein de l'armée et des nombreux services de sécurité disposent d'une confortable marge de manoeuvre pour éviter le massacre de leurs concitoyens qui revendiquent des droits et un peu de liberté. Même quand les grandes puissances soutiennent le dictateur.
Le cas de la Tunisie est unique en Afrique et au Moyen Orient. Le général Ammar Rachid s'était interdit d'ordonner à ses troupes d'assassiner des manifestant pacifiques tandis que les responsables de la garde présidentielle rapprochée avaient menti à Ben Ali pour l'exiler du pays.
Par contre, en Egypte Tantaoui nous donne le sentiment d'avoir retiré Moubarak de la circulation sur ordre d'Obama, puisque la vielle du coup d'Etat* il avait effectué un déplacement express à Washington. L'Amérique étant au plus haut point préoccupé par la sauvegarde du régime de Moubarak même sans Moubarak.
En Libye, au Yèmen, en Jordanie, en Syrie les généraux et les responsables sécuritaires sont de la famille, de la tribu et autres alliances intéressées. Ils n'ont pas la vision de la nation et de l'Etat. C'est plutôt l'esprit d'une bande organisée autour du généreux chef et de sa famille.
En Arabie Saoudite, au Bahreïn, en Jordanie, au Koweit et dans les monarchies confettis du Golfe, c'est l'Amérique qui est garante de la Sécurité et la pérennité des dynasties.
Les bases militaires stratégiques et les puits de pétrole sont tellement indispensables que les Américains n'hésiteront pas à sacrifier tous les peuples du Moyen Orient.
Ce qu'ils ont toujours fait depuis le partage du monde entre Londres, Paris et Washington.
MAHDI HOCINE
*) Moubarak a été destitué, il n'est pas parti de son plein gré.
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